Liquidation judiciaire : quelles sont les conditions pour une poursuite d’activité ?
Qu’est-ce que la liquidation judiciaire ?
La liquidation judiciaire est une procédure destinée à mettre fin à l’activité d’une entreprise lorsque celle-ci est en état de cessation de paiements et que son redressement est manifestement impossible. Cette procédure a pour objectif d’optimiser la cession des actifs de l’entreprise et le paiement des créanciers grâce à un dispositif juridique spécifique.
Toutes les sociétés commerciales, artisanales, agricoles ou libérales sont concernées par la liquidation judiciaire, ainsi que les entrepreneurs individuels (y compris les micro-entrepreneurs) et les personnes morales de droit privé comme les associations.
En principe, la liquidation judiciaire met définitivement fin à l’activité de l’entreprise. Toutefois, dans certains cas précis, une poursuite temporaire de l’activité peut être autorisée.

La procédure de liquidation judiciaire
La procédure de liquidation judiciaire doit être obligatoirement demandée par le dirigeant de l’entreprise dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements. Le dirigeant qui ne respecte pas ce délai peut être condamné par le tribunal à une interdiction de gérer.
L’ouverture de la liquidation judiciaire peut également être demandée par :
- Le procureur de la République
- Un des créanciers de l’entreprise (fournisseur, propriétaire du local commercial, Urssaf, etc.)
Le tribunal compétent dépend de l’activité exercée par l’entreprise :
- Pour une activité commerciale ou artisanale : le tribunal de commerce ou le tribunal des activités économiques (TAE) depuis le 1er janvier 2025 dans certaines villes
- Pour une activité libérale : le tribunal judiciaire ou le TAE
Lorsque la demande de liquidation est acceptée, le tribunal prononce l’ouverture de la procédure et nomme les intervenants (liquidateur, juge-commissaire, représentant des salariés).
Les conditions de la poursuite d’activité après liquidation judiciaire
En principe, la liquidation judiciaire entraîne l’arrêt immédiat de l’activité de l’entreprise. Cependant, l’article L.641-10 alinéa 1er du Code de Commerce prévoit que « si la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable ou si l’intérêt public ou celui des créanciers l’exige, le maintien de l’activité peut être autorisé par le tribunal pour une durée maximale fixée par décret en Conseil d’État ».
Trois conditions peuvent donc justifier une poursuite d’activité :
1. La perspective d’une cession de l’entreprise
Lorsqu’une cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable, le maintien temporaire de l’activité peut être autorisé pour préserver la valeur des actifs et faciliter la reprise par un tiers.
2. L’intérêt public
L’intérêt public peut être interprété comme l’intérêt des salariés ou de la collectivité. Par exemple :
- Se donner le temps de préparer au mieux les licenciements
- Terminer un chantier en cours
- Écouler les stocks
3. L’intérêt des créanciers
La poursuite d’activité peut être dans l’intérêt des créanciers lorsqu’elle permet d’améliorer leur désintéressement, par exemple en valorisant mieux les actifs ou en générant des revenus supplémentaires.

Durée et modalités de la poursuite d’activité
Quelle que soit la situation, la poursuite de l’activité ne pourra pas excéder trois mois, conformément à l’article R641-18 du Code de commerce. Cette période peut être prolongée une fois, pour la même durée, à la demande du ministère public.
Durant cette période, c’est le liquidateur qui est chargé de la poursuite de l’activité, avec l’aide éventuelle d’un administrateur judiciaire. Ce dernier devient obligatoire lorsque l’entreprise compte plus de 20 salariés et réalise un chiffre d’affaires supérieur à 3 000 000 €.
La continuation des contrats en cours (par exemple, bail commercial) peut être utile au maintien de l’activité. C’est le liquidateur ou l’administrateur qui décide de la poursuite des contrats en cours.
Cas particulier des exploitations agricoles
Les exploitations agricoles bénéficient d’un régime spécifique : elles peuvent poursuivre leur activité jusqu’à la fin de l’année culturale en cours, en fonction « des périodes de culture et des usages inhérents aux productions concernées ». Ce délai spécifique est fixé par le tribunal.
Pourquoi opter pour la liquidation judiciaire avec poursuite d’activité ?
La poursuite temporaire de l’activité après liquidation judiciaire présente plusieurs avantages :
- Permettre d’envisager sereinement une éventuelle cession d’entreprise
- Désintéresser davantage les créanciers
- Préparer les licenciements des salariés sans précipitation
- Valoriser au mieux les actifs de l’entreprise
- Clôturer l’entreprise de manière réfléchie, sans léser aucune partie
Bien que cette possibilité ne soit pas ouverte à toutes les entreprises en liquidation judiciaire, elle constitue une option intéressante pour mieux préparer l’avenir et optimiser les résultats de la liquidation.

Conséquences de la liquidation judiciaire sur le dirigeant
Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte dessaisissement du dirigeant jusqu’à la clôture de la liquidation. Cela signifie que c’est désormais le liquidateur qui représente l’entreprise.
Le dirigeant peut toutefois rester en place lors de l’ouverture de la liquidation judiciaire, sauf si les statuts de la société ou une assemblée des associés prévoient le contraire. Ses pouvoirs sont cependant très réduits : il ne peut plus vendre un actif, encaisser une somme d’argent, résilier un contrat, etc.
Seul le liquidateur a mandat, une fois désigné par le tribunal, pour vendre les actifs de l’entreprise et poursuivre des procédures judiciaires à l’encontre des débiteurs.





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